Court passage à Potosi
Après un séjour inoubliable à Sucre et la rencontre exceptionnelle de Javier, il est temps pour nous de quitter Sucre et de rejoindre Potosi, connue pour ses mines d’argent.
Potosi n’est située qu’à 3 heures de route de Sucre. Javier a encore fait preuve de gentillesse et de générosité en nous conduisant au terminal de bus et en nous aidant à acheter nos tickets de bus. Nous disons au revoir à Javier avant de monter dans le bus, nous n’oublierons jamais ces quelques jours passés chez lui.
C’est donc en début d’après-midi que nous arrivons à Potosi. Potosi est la ville de plus de 100 000 habitants la plus haute du monde, à 4060m d’altitude.
La ville est principalement connue pour l’exploitation des mines et de l’argent. Les espagnols ont découvert l’argent dans la montagne du Cerro Rico (signifie « montagne riche ». Cette colline doit son nom au précieux minerai qui la compose, l’argent) en 1545 et en ont extrait pendant des années, causant des milliers de morts à cause des conditions précaires d’exploitation. L’exploitation minière fait aujourd’hui encore vivre la ville avec aussi le fer, le zinc et l’étain.
Après avoir déposé nos affaires à l’auberge, nous avons fait un tout petit tour de la ville.
La promenade dans les petites ruelles de cette ancienne ville coloniale a été très agréable.
Bien différente de Sucre, et avec un peu moins de charme selon nous, la ville est néanmoins très calme et accueillante. On y trouve de belles maisons coloniales, et de nombreuses rues piétonnes.
Sa place principale, La Plaza 10 de Noviembre, est entourée d’édifices à l’architecture somptueuse comme sa cathédrale.
La ville est d’ailleurs listée au patrimoine culturel de l’humanité.
Lendemain matin, nous avions prévus de partir visiter une mine avec l’agence de notre auberge. Mais Matt partira seul… En effet, Maider est de nouveau victime de diarrhée. On commence réellement à en avoir marre. L’idée de se retrouver pendant 3 heures sous la terre sans pouvoir aller aux toilettes si besoin l’a convaincu à ne pas y aller...
Visite d’une mine d’argent
Départ à 8h45 de l’auberge avec le guide et premier arrêt dans les locaux de l’agence pour se changer et mettre un sur pantalon, une veste, des bottes et le casque avec frontale. Nous voilà habillés en parfaits petits mineurs… Direction le marché des mineurs.
Après quelques minutes de bus, nous nous arrêtons dans le quartier des mineurs de Potosi. C’est ici que les mineurs achètent ce dont ils ont besoin pour leur journée de travail : boissons, feuille de coca, dynamite, alcool à 95%, masques anti poussière etc… Le guide nous explique d’abord comment ils mâchent les feuilles de Coca à longueur de journée pour leur donner de l’énergie et couper la faim et la soif.
Il nous explique ensuite les fonctionnements d’un bâton de dynamite avant de nous laisser 10 minutes pour acheter des cadeaux que l’on offrira aux mineurs une fois dans la mine. J’achète donc une bouteille de soda et un sachet de feuilles de Coca.
Les 10 minutes se transforment facilement en une demi heure, on a perdu nos guides que l’on attendait dans le bus. Apparemment, un de nos guides a oublié son certificat qui lui autorise à nous faire visiter les mines. Une fois revenu, on continue à attendre, cette fois ci nous attendons ses copains mineurs qui veulent profiter du bus pour aller bosser. Au final, on part enfin direction les mines vers 10h30… On apprend à ne pas être pressé en Amérique du Sud.
En arrivant aux mines, le guide nous explique que pas beaucoup de mineurs travaillent aujourd’hui. En effet, nous sommes vendredi matin et mercredi il y avait la finale du tournoi de foot des mineurs, donc ils ont tous beaucoup bu. Ensuite, le jeudi il y avait l’anniversaire de la section de la mine dans laquelle on se trouvait. Du coup rebelote, ils ont tué deux lamas et enterré la tête et les intestins près de la mine comme porte-bonheur, et fait un gros barbecue avec le reste. Évidemment, le tout était accompagné de beaucoup, beaucoup, beaucoup de bières. Du coup, en ce vendredi matin, les mineurs n’étaient pas en grande forme, voire pas présents du tout. On en a d’ailleurs rencontré un en rentrant dans la mine qui nous expliquait que cela faisait 3 jours qu’il buvait, il avait encore les yeux vitreux. Et il nous a demandé si on pouvait pas lui donner du soda !
Après avoir donné tous nos cadeaux aux mineurs devant l’entrée, on s’engouffre enfin dans la mine. Alors la première chose que l’on remarque, c’est cette poussière partout dans la mine et dans l’air. Le guide nous explique d’ailleurs que tous les mineurs ont une maladie chronique au niveau des poumons à force de respirer cette poussière à longueur de journée.
Première étape, on s’arrête auprès du diable. Celui-ci est le protecteur de la mine. En effet, les mineurs, lorsqu’ils sont sous terre, vénèrent le diable. Tous les premiers et derniers vendredi du mois, les mineurs viennent se recueillir et faire des offrandes au diable pour demander la sécurité, la chance et que la montagne soit pleine de minerai. Il est coutume de déposer des feuilles de Coca sur la tête et les deux mains du diable, ainsi que sur son sexe en érection pour la fertilité. Ensuite, les mineurs boivent de l’alcool à 95%, sans oublier de verser du contenu de leur bouchon par terre pour Pachamama. Et oui, car sans mère nature il n’y aurait pas de minerai ! Pour notre part, le guide n’avait évidemment pas oublié la bouteille d’alcool et nous avons du faire 3 vœux auprès de Pachamama avant de boire un bouchon d’alcool.
Après cela, nous avons continué à marcher dans la mine, en faisant très attention à la tête. J’ai du passer la moitié de mon temps plié en deux et heureusement que j’avais un casque car je me suis cogné la tête plus d’une fois. Le guide nous explique que nous sommes en train de marcher au 1er niveau de la mine, c’est le seul qui a des rails pour les petits wagonnets qui transportent les pierres à l’extérieur. Les lignes de minéraux allant de bas en haut, les mineurs sont obligés de monter ou descendre pour les extraire. Nous avons donc du monter, ramper et escalader une partie de la mine pour aller trouver des mineurs en train de travailler. Ils nous expliquent que dans la matinée, ils ont dynamité l’endroit et que là ils sont en train de récupérer du minerai, principalement du zinc et un peu d’argent.
Globalement, les conditions de travail des mineurs sont exécrables. Ils passent 8 heures par jours, 6 jours sur 7 dans les mines sans jamais en sortir. Aujourd’hui, les mineurs sont organisés en coopératives. A l’époque où le gouvernement Bolivien exploitait ces mines, les conditions étaient bien meilleures. Ils ne travaillaient que 5 jours par semaine et la sécurité était bien meilleure puisque le gouvernement faisait appel à des professionnels. Aujourd’hui, 60% de la population masculine de Potosi travaille dans les mines. Le premier avantage est que le travail paye très bien, entre 1000 et 3000 Bolivianos à la semaine. Et le second est qu’il n’y a besoin d’aucune formation, même pire, les professionnels ne sont pas bienvenus. Pour les mineurs, ces professionnels ne connaissent que la théorie et n’ont aucune expérience du terrain. Résultat, il y a d’avantage d’accidents qu’à l’époque de l’exploitation par le gouvernement Bolivien puisque personne n’est là pour gérer la sécurité. Tous les mois, 10 personnes meurent à cause d’accidents dans les mines, et 4 autres à cause de maladies chroniques des poumons.
Finalement, le guide nous explique que les mineurs ne mangent pas dans les mines. La première raison, c’est que toute la poussière se déposerait sur les aliments, et s’ils mangeaient ces aliment pleins de poussières ils seraient pris de diarrhées. Ensuite, c’est parce qu’ils ont interdiction de faire caca dans les mines. En effet, avec la chaleur, les excréments libèrent du méthane, qui est un gaz explosif. Donc pendant 8 heures, ils ne font que fumer, mâcher des feuilles de Coca et boire de l’alcool à 95% qu’ils dilluent dans du soda ou de l’eau.
Après plus de 2h30 dans les mines, on ressort finalement à l’air libre. Très content d’enfin respirer de l’air pur, nous redescendons vers Potosi. Au final, une expérience intéressante et qui offre un aperçu de la vie des mineurs.
Visite de la Casa de la Moneda
Après être rentré à l’auberge pour manger un bout avec Maider, je ressors pour cette fois visiter la Casa de la Moneda. C’est un musée qui retrace l’histoire de la monnaie à Potosi. En effet, une fois que les espagnols on découvert qu’il y avait autant d’argent à Potosi, ils ont décidé d’y installer la fabrication de leur monnaie, le Real.
Le musée retrace l’histoire de la fabrication de la monnaie et surtout l’évolution à travers le temps. Au départ, les pièces étaient toutes fabriquées au marteau. Ensuite, l’Espagne a fait envoyé des machines fonctionnant grâce à des mules pour aplatir les plaques d’argent et découper les pièces en ronds parfaits. Plus tard, sont apparues les machines à vapeur venues des États-Unis, puis les machines électriques. Au final, la production de pièces s’est complètement arrêtée aux alentours de 1950. Et aujourd’hui, les pièces boliviennes sont fabriquées au Chili, sauf la pièce de 5 qui est fabriquée au Canada. Et tous les billets sont fabriqués en France. La guide nous explique aussi que entre 1650 et 1750, grâce à sa production d’argent, Potosi est une des villes les plus importantes du monde. En comparaison à la même époque, Paris accueillait environ 45 000 habitants, Londres autour de 65 000 et Potosi en comptant déjà 160 000 ! Bon alors autant vous dire que j’étais très sceptique quand j’ai entendu notre guide donner ces chiffres… Après vérification, il s’avère qu’elle nous a raconté n’importe quoi, puisque vers 1700, Paris et Londres comptaient toutes les deux près d’un demi million d’habitants…
C’est une dernière soirée au calme que nous passerons, parce que le lendemain, nous avons un bus à 8h pour rejoindre Tupiza, à 5 heures de route de Potosi, qui nous servira de point de départ pour un séjour dans le Salar de Uyuni.